AÏCHA
Je n’arrive pas à dormir. Je n’arrête pas de penser à toi, Aïcha. Tu es si belle, si douce…
Voilà environ deux semaines, tu es arrivée dans notre collège. Tu t’es retrouvée dans la même classe que moi, en 4ème A. Bien sûr, mes copains ont tout de suite commencé à se moquer de toi, à cause de ta peau un peu mate, et de tes origines arabes. Moi, pour une fois, je ne disais rien. Comment pouvais-je me moquer d’une fille comme toi, Aïcha. Tes cheveux noirs, ce jour là détachés, faisaient ressortir la couleur mate de ton visage, où de petits yeux verts brillaient avec malice. Mes copains arrêtèrent de rire, et me regardèrent bizarrement. Ils ne pouvaient pas comprendre pourquoi je ne riais pas, ils n’ont jamais été amoureux, contrairement à moi.
Aïcha, comme j’aimerais que tu sois là, près de moi, pour te dire à quel point je t’aime…
A la récréation, tu t’es retrouvée toute seule. J’aurais aimé aller vers toi, pour apprendre à te connaître, pour te découvrir.
Mais je n’ai pas pu, car si je l’avais fait, mes copains m’auraient posé de nombreuses questions et il aurait fallu que je leur explique pourquoi je voulais aller te voir. Et ce n’était pas possible. L’amour ne peut pas s’expliquer. Il se ressent, se partage, se vit. Mais il ne s’explique pas.
Le soir, après les cours, au lieu de rentrer directement chez moi, je t’ai suivie pour savoir où tu habites. Quand tu as franchi le seuil, mon cœur a explosé de joie : ta maison est située à trois numéros de la mienne. J’allais pouvoir rentrer tous les soirs avec toi, et personne ne trouverait ça bizarre.
En arrivant à la maison, je m’enfermai dans ma chambre pour être au calme. Là, je t’écrivis des poèmes, parlant de toi, de ton pays, parlant d’amour. En voici un :
Petite fleur du désert,
Tu es entrée dans mon cœur
Où tu répands toute ta douceur.
Tu as dû traverser bien des calvaires,
Mais maintenant je suis là,
Tu peux compter sur moi.
Il y en a bien d’autres comme celui-là. Peut-être qu’un jour je te les aurais montrés, si j’avais osé t’avouer mon amour. Mais à cet instant, j’ai préféré le taire.
Deux semaines se sont écoulées depuis ton arrivée. Tous les soirs, nous faisons le chemin du retour ensemble. J’aime t’entendre parler de toi, de la vie que tu menais dans ton ancien pays, l’Algérie.
Je suis là, dans mon lit, en train de penser à toi. Tu es toujours présente dans mes pensées et dans mon cœur. Je m’endors enfin, en gardant l’image de ton visage dans mon esprit.
Je sors de chez moi pour me rendre au collège. Et là, Aïcha, je te vois. Mais ce que je découvre en ce jour me brise le cœur. Tu es devant chez toi, comme tous les autres matins… mais tu n’es pas seule. Tu es avec Bastien, mon propre cousin. Tu plaisantes et tu lui souris. Tu as l’air si heureuse ! Je sens des larmes couler le long de mes joues. A ce moment, je donnerais n’importe quoi pour être à sa place. Je pourrais crier au monde entier que je t’aime, juste pour avoir un sourire, un baiser de toi. Mais voilà, même si je te le dis, tu ne pourrais m’aimer. Car je suis une fille.